Cameroun: enfin des salaires pour magistrats municipaux
À la lecture du décret n°2015/405 signé par le président de la République le 16 septembre 2015, plusieurs constances apparaissent dans le traitement salarial des responsables des municipalités.
Une sorte de suprématie de la légalité sur la légitimité se confirme à l’analyse du décret présidentiel n°2015/405 fixant les modalités de rémunération des délégués du gouvernement, des maires et de leurs adjoints au Cameroun. Quelques soient les hypothèses, un maire jouissant d’une légitimité électorale n’aura jamais un revenu mensuel supérieur à celui d’un délégué du gouvernement nommé par le président de la République. Au-delà de ce traitement politique des rémunérations des magistrats municipaux, il faut reconnaître que le gouvernement a tenu ses engagements pris au début de l’année 2015.
Au cours de l’assemblée générale et extraordinaire le 14 janvier 2015 qui a vu le consensus prendre le dessus sur le désordre lors de la désignation du nouveau bureau des Communes et villes unies du Cameroun (CVUC) les maires étaient gonflés à bloc. Il demandait à Emile Andze Andze, le président réélu face à Dieudonné Zang Mba d’accélérer les démarches visant à accorder à chaque magistrat municipal un salaire. Une revendication qui faisait grand bruit depuis plusieurs années notamment à partir de 2010 année du début des transferts de compétences aux collectivités territoriales décentralisées. Tenez ce que disait Guy Wambo, le maire de la commune de Loum au cours de cette assemblée générale du 14 janvier 2015 : «Il ne faut pas donner des choux à la chèvre. Nous devons éviter de discuter avec le gouvernement sur la base des accointances politiques. Il faut donner un délai pour évaluer les actions du bureau national. Un délai de six mois ».
Faisant allusion aux salaires, il prédisait que si les problèmes des maires ne trouvent pas une oreille attentive et des solutions, que les élus locaux « arrêtent de travailler ». Huit mois après, le 16 septembre 2015, le président de la République signait un décret plusieurs fois annoncé par René Emmanuel Sadi, le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, tutelle de plein droit sur les collectivités territoriales décentralisées (CTD). L’Etat avait coutume d’inscrire dans la dotation générale de la décentralisation une ligne de trois milliards FCFA pour le traitement salarial des magistrats municipaux. Aucun élu local n’a perçu ce montant depuis 2010.
740 000 FCFA au moins pour un maire
Les maires tablaient sur une harmonisation de leur salaire à 400 000 FCFA mensuel. Spéculant sur la base des trois milliards FCFA annuellement inscrits dans la dotation générale de la décentralisation depuis 2010. Le texte du 16 septembre 2015 vient apporter des correctifs aux aspirations des élus locaux. Le revenu brut des magistrats municipaux est composé: d’un salaire mensuel, d’une indemnité de fonctions, une indemnité de représentations et autres avantages. Nouveauté subrepticement glissée en classant les CTD en fonction des revenues confirme des inégalités dans le traitement des élus locaux. Les frais de missions à l’étranger s’inscrit dans la logique d’un traitement mesuré des responsables du développement local au Cameroun.
Suivant les estimations faites du décret du 16 septembre 2015 qui rompt avec les dispositions du décret n°81/148 du 13 avril 1981 fixant les indemnités et avantages accordés aux magistrats municipaux, un maire de la classe 1 avec un compte administratif de cinq milliards FCFA minimum ne gagnera pas moins de 1 375 000 FCFA : salaire, indemnités, frais de téléphone, eau, électricité et d’entretien de logement compris. Celui de la classe 2 avec un compte administratif oscillant entre 1 et 5 milliards FCFA aura droit à 1 075 000 FCFA tandis qu’un élu local de la classe 3 aura 850 000 FCFA avec un compte administratif de 250 millions FCFA à un milliard FCFA. C’est le niveau de la grande franche des CTD au moment de la publication du décret présidentiel. Le plus bas salaire est de 740 000 FCFA avec un compte administratif de moins de 250 millions FCFA.
Leurs adjoints peuvent avoir des revenus mensuels de l’ordre de 533 000 FCFA pour la classe 1. Les adjoints au maire de la classe 2 recevront 425 000 FCFA, ceux de la classe 3 percevront 350 000 FCFA et le plus bas revenu sera 315 000 FCFA pour la classe 4. Ils n’auront pas droit à l’entretien du logement encore moins aux frais d’ameublement du logement de fonction avec des taux dégressifs maximum de 15 millions FCFA, 10 millions FCFA, sept millions FCFA et cinq millions FCFA allant de la classe 1, la plus huppée à la classe 4.
Douala et Yaoundé les mieux payés
L’analyse du décret présidentiel du 16 septembre 2015 sur les rémunérations des délégués du gouvernement, des maires et de leurs adjoints montrent qu’un adjoint au délégué du gouvernement des classes 1 et 2 aura toujours un revenu inférieur à celui d’un maire des classes 1, 2 et 3. Puisque, en considérant le salaire mensuel, les avantages, frais de téléphone, eau, électricité, un adjoint au délégué du gouvernement de classe 1 est à 616 000 FCFA alors que celui de la classe 2 est à 508 000 FCFA par mois. Ce niveau de salaire confirme aussi la supériorité des adjoints au délégué du gouvernement sur les adjoints au maire.
Les délégués du gouvernement bénéficieront d’un revenu de 1 625 000 FCFA pour la classe 1 lorsque le compte administratif minimum est de 5 milliards FCFA. Lorsqu’on envisage les villes de Yaoundé et de Douala par exemple, l’indemnité de fonction 500 000 FCFA plus 50 000 FCFA par tranche de cinq milliards FCFA viendra gonfler davantage leur revenu. Dans cette hypothèse, le délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Douala, la ville la plus riche du pays sera l’homme qui pèsera le plus lourd dans le monde municipal au Cameroun.
Ce d’autant que les délégués du gouvernement de la classe 2, compte administratif de 1 milliards à 5 milliards FCFA pourront avoir un revenu de l’ordre de 1 325 000 FCFA par mois. Si revenu mensuel pouvait rimer avec amélioration des conditions de vie au sein des municipalités du pays, les contribuables et les gestionnaires des fonds publics seront dans un partenariat gagnant-gagnant. Répondant aux revendications des magistrats municipaux lors de l’assemblée générale des CVUC le 14 janvier 2015, René Emmanuel Sadi qui gère le portefeuille de la décentralisation, avait annoncé «une obligation des résultats dans l’amélioration du cadre de vie des populations».
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